Nouvelle vague de dépréciation d'actifs


Après plusieurs mois d’atermoiements durant lesquels les agences de notation hésitaient à prononcer le verdict que tous les observateurs savaient inévitable, Standard & Poor’s a décidé franchir le pas. Les monolines - dont la valeur réelle se situe dans le registre du junk - se sont vues retirer la note d’excellence, pourtant indispensable à l’exercice de leur activité.

Les notations attribuées aux deux majors du secteur, Ambac et MBIA, ont été rétrogradées de deux niveaux, passant de « AAA » à « AA ».

Le métier des réhausseurs de crédit consiste à assumer le risque intrinsèque de défaillance sur les titres adossés à des crédits, permettant ainsi de leur attribuer la note AAA, indice d’une fiabilité maximum.

Cette décision de S&P équivaut à leur arrêt de mort. La qualité de leur assurance ne pouvant par nature être supérieure à la notation de l’entreprise, elles ne sont plus à même de délivrer la garantie AAA exigée par la plupart des investisseurs.

L’agence de notation Moody’s, qui a placé à nouveau les assureurs sous observation, devrait vraisemblablement imiter sous peu sa consoeur.

MBIA assure 668 milliards de crédit et Ambac 551 milliards.

Depuis le début de la crise, le cours de MBIA a perdu 91% et celui d’Ambac 97%.

Il est difficile de chiffrer dans l’immédiat l’ampleur des secousses qui vont à nouveau ébranler le système, mais une chose est sûre : la baisse de la note des assureurs, lorsqu’elle sera confirmée par Moody’s, va se propager sur celle du papier qu’ils garantissent.

D’ores et déjà, l’économiste Yves Smith fait état d’une première estimation. Sur les 1 200 milliards d’actifs garantis par les monolines, 600 milliards seraient détenus par les banques.

Selon Barclay’s, les dépréciations totales induites par cette rétrogradation atteindraient 143 milliards. UBS les estime à 203 milliards.

Citi, Merrill et UBS enregistreraient à elles trois entre 40 et 70 milliards de pertes.

Outre les banques, les municipalités sont également concernées. Historiquement, les monolines avaient débuté leur activité en garantissant les emprunts des collectivités locales. Des milliers d’obligations émises par les municipalités, dont Mobile, en Alabama, et Yonkers, dant l’état de New York, ont été dégradées par Standard & Poor’s.

Tous les gestionnaires de fonds qui se sont engagés auprès de leurs clients à ne détenir que des actifs classés AAA vont devoir également procéder à des ventes ou tenter de réassurer le papier désormais à découvert.

Sont concernés de la même façon les collatéraux gagés auprès de la Fed en échange des liquidités massives que la banque centrale a accordées aux banques. La Fed exige du AAA et contraindra les banques à reprendre les actifs dégradés.

De toute évidence, il s’agit d’un nouveau tournant dans cette crise, et il s’annonce délicat à négocier pour des établissements déjà fragilisés par les centaines de milliards qui se sont évaporés depuis le début de la crise.