Qu'est ce qui arrêtera la FED et les autorités américaines ?


Alors que le CAC40 explorait de nouveaux sommets la semaine dernière, j'étais en train de lire un article signé par un certain Chris Martenson (Guest Post: Don't Worry - They'll Just Change The Rules | zero hedge).
Je ne connaissais pas encore cet analyste, mais la lecture de cet article à cet instant précis commença à me glacer le sang. .

Et si j'avais tout prévu à l'envers ?

Et si c'est l'inflation qui allait désormais l'emporter dès maintenant, grâce aux mesures des autorités (QE1, QE2, etc...), malgré l'alerte déflationniste et le mega-krach que nous avions connu en 2008.

Comme souvent, tout est question de timing, et c'est bien la difficulté. Mais étudions pour l'instant l'argument ultime de la thèse inflationiste.

Au fond cet analyse de Chris Martenson était en train de développer mon idée initiale de l'économie américaine qui date de 2006, que j'avais eu avant la crise: à savoir que les autorités américaines avaient des moyens (et une volonté) illimités pour prévenir le développement de la crise, même si c'est au prix d'une inflation incontrôlée à plus long terme. (Théorie aussi désignée sous l'expression "Helicopter Ben" et qui a été en partie contredite par le krach spéctaculaire).

Mais surtout l'auteur était en train de forcer un coin dans une des failles de l'argument déflationniste que j'ai entre temps adopté et qui se base principalement sur la dynamique de l'implosion des créances causée par les pertes sur les défauts de paiement, et de la baisse des actifs qui en découle.

La faille est : "qu'est ce qui se passe si le gouvernement permet de cacher ces mauvaises dettes de façon indéfinie en laissant la FED les racheter à leur valeur nominale ?"

Il y a déjà eu plusieurs précédents montrant que les autorités peuvent tordre les règles existantes. Sans être un théoriste de la conspiration, n'importe quel observateur attentif est obligé de l'admettre. (on peut citer comme exemple: la résolution du Flash Krach, qui a entrainé l'élimination "arbitraire"de nombreux trades, les règles de la CFTC à géométrie variable concernant les tailles limites de position , et enfin la NON-interdiction du Flash Trading)

On pourrait rétorquer qu'il s'agit uniquement de règles de marché très techniques qui ne concernent pas l'économie réelle.

Mais lorsqu'il s'agit de l'économie réelle, que se passe-t-il ? Il est vrai qu'il y a le "Foreclosure Gate" Il faudrait suivre davantage ce qui se passe sur ce front, et comment les autorités vont s'y attaquer. On pourrait s'attendre par exemple, à ce que tout soit oublié et mis de coté, au mépris des règles antérieures. Résultat : les créanciers ne réclament plus leur argent, mais en échange reçoivent de l'argent (nouvellement créé) de la FED. Je schématise, mais en gros c'est cela qui est en germes.

Et tous les mécontents et les rigoristes pourraient ne pas avoir suffisamment de poids politique pour l'empêcher.
Quand on voit le dernier "Deal" entre les Démocrates et les Républicains ("on garde les réductions d'impots très couteuses pour les riches, et en échange, on garde aussi les très couteux programmes sociaux pour les pauvres"), il semble y avoir un consensus pour la politique de l'autruche et donc par extension, la violation des règles prudentielles et l'ouverture en grand des vannes des liquidités.

C'est là où se situe le doute que ce genre d'arguments fait germer en moi, au sujet de la crainte déflationniste.


Donc, si personne à l'intérieur des Etats-Unis ne peut s' opposer à cette fuite en avant d'assouplissement monétaire, sérieusement, qui pourrait les en empêcher ?

- Les chinois ? Ils sont sans doute coincés avec leur "peg" au dollar, même si ils cherchent actuellement à diversifier leurs réserves de change.
- Les européens ? N'en parlons même pas, ils ont suffisamment de problèmes de leur coté pour maintenir un semblant de cohérence à la zone euro


Peut-être que ce qui reste capable de limiter la volonté de la FED, ce sont "les rentiers de la planète" qui pourraient s'y opposer ?

Et par "rentier de la planète", j'entend d'abord, ceux qui possèdent une richesse établie qu'il leur suffit de faire fructifier : le pétrole.

Je parle donc des pays producteurs de pétrole, qui n'ont pas intérêt à être payé dans une monnaie dévaluée (que ce soit par rapport aux autres devises ou par rapport à l'or).

Et c'est justement déjà le cas depuis le deuxième semestre 2008. Malgré le rebond de 2009-2010, le niveau des prix du pétrole exprimé en euros n'est pas encore revenu au plus haut observé début Juillet 2008. Il semble même que la tendance se soit inversée.

Pareil pour le cours du pétrole en or qui est sorti d'un canal relativement élevé qui tenait depuis le début des années 2000.

Si cette tendance se poursuit les producteurs de pétrole pourraient perdant ou en tout cas devenir moins gagnants.

Dès lors ces producteurs de pétrole vont être de plus en plus tenté de vendre leur pétrole dans d'autres devises que le dollar, ou bien de convertir instantanément leurs dollars en d'autres richesses, ce qui pourrait précipiter la chute du dollar.

L'autre option pour protéger leurs revenues (ainsi que leurs actifs à plus long terme) est de limiter leur production de pétrole, ce qu'ils n'auraient aucun mal à faire, et ce qui aurait les mêmes conséquences (hausse du pétrole en dollars)

Et cela est d'autant plus vrai que le moment du" Peak Oil" se rapproche dangereusement.

Là est la véritable menace pour les Etats-Unis et le dollar et ce qui pourrait remettre en cause leur politique monétaire.

Mais il s'agit d'une partie de billard à plusieurs bandes.

Dans une certaine mesure le dollar faible bénéficie à la croissance, mais son corrollaire (pétrole élevé) nuit à la croissance. L'idéal serait donc de rester à l'intérieur d'un canal. Mais les cours restent rarement raisonnable.

Toute la difficulté consiste à connaitre le seuil à partir de laquelle la dynamique s'inverse.

En 2008 on a connu un paroxysme (dollar faible, pétrole élevé) qui a sans doute contribué à déclencher la récession (si l'on met de coté le Krach qui était concomittant).

Il se peut que le seuil de "paroxysme" soit plus bas cette fois-ci, à cause de l'état convalescent de l'économie, américaine en particulier qui est si sensible aux variations des prix du pétrole.

Et c'est pourquoi on pourrait ne pas revoir les sommets de prix du pétrole de 2008, et observer un retournement plus tôt.