République bananière

Je viens de lire l'article suivant dans le NY Times:

Our Banana Republic - NYTimes.com


(Notre propre république bananière : les résultats sur Google sont révélateurs à propos de la France)





Cet article me rappelle la réflexion que je me fais souvent : comment peut-on être libéral, tout en déplorant les inégalités et en souhaitant les corriger ?

Après tout, la plupart des libéraux (souvent classé à droite en France) défendent que les mesures "sociales" destinées à combattre les inégalités, sont nocives économiquement et même moralement.

Donc on peut être tenté de croire qu'il faut choisir entre être libéral et combattre les inégalités.

Par ailleurs, on peut parfois être tenté de penser que ce sont les inégalités qui créent le dynamisme économique. Ces inégalités seraient donc comme la différence de "tension électrique" qui fait fonctionner le courant, permettant une allocation optimale du capital et de la main d'oeuvre. A contrario les mesures égalitaires freineraient le dynamisme des acteurs économiques. C'est cela le discours habituel des libéraux, mais qui devient de plus en plus difficilement tenable politiquement dans le contexte actuel.

A cela on pourrait rétorquer que les coûts économiques des inégalités sociales ne sont pas pris en compte dans ce calcul. Par exemple l'absence de protection sociale ou l'insuffisance du niveau d'éducation ont des coûts sociétals et par conséquent économiques. Tout comme l'absence de demande solvable pour des marchandises finit par devenir un problème pour l'économie d'un pays (ça c'est plutôt la thèse marxiste, mais qui n'est pas sans fondement). Et tout cela sans même parler de la crise.

Mais il y a encore un autre argument, libéral celui-là, à mon avis, et qui milite contre les inégalités.

J'observe que les déficiences du marchés sont la raison principale pour laquelle les inégalités existent.
Donc combattre les inégalités, c'est aller vers un marché plus libre.


J'ai appris en lisant Fernand Braudel, que l'Etat et les détenteurs du Capital se sont de tout temps allié pour fausser le marché en utilisant des privilèges de castes.

Cette situation a progressivement changé avec l'évolution de la société et la disparition de certains de ces privilèges. Mais force est de constater que certains privilèges demeurent et vont même en s'accroissant.

Avec l'hypercapitalisme, nous n'avons pas pour autant un marché hyperlibre, bien au contraire.

Un vrai libéral doit donc selon moi s'intéresser aux causes de ces inégalités qui empêchent un marché libre et aussi une société libre.

Il s'agit d'un chantier de longue haleine qui concerne les institutions, les lois et c'est donc un sujet politique aussi.
La régulation "équitable" du marché ne devrait pas être laissée aux seuls acteurs oligarchiques du marché, comme c'est souvent le cas aujourd'hui.

Le cynique en moi pense que cela ne va pas changer du jour au lendemain, mais il vaudrait mieux accélérer le mouvement avant que le système s'écroule sur lui-même.